mercredi 17 juillet 2013

Il y a une sensation et il y a des dents

La semaine dernière, il m'est arrivé un truc très déconcertant, mais très éclairant. Je me réveillais avec peine (comme tous les matins), et mes pensées se rassemblaient vaguement, quelque part dans mon cerveau. Différentes sensations parvenaient à ma conscience, plus ou moins ordonnées, des bruits, des odeurs, le chant des oiseaux matinaux, tout ça en un tas assez confus.

Et à un moment, est venue à ma conscience une sensation bizarre, quelque chose qui avait une forme allongée, une couleur blanchâtre, et une texture métallique. C'était devant moi, ça flottait dans l'obscurité, ça éveillait d'obscurs échos en moi, je ne savais pas où, et il m'a fallu quelques secondes pour que je réalise que c'était...
une légère douleur dentaire, irradiant dans ma mâchoire inférieure gauche. Comme quand on boit quelque chose de très froid et qu'une dent proteste. Immédiatement, cette sensation confuse et délocalisée réintégra sa place, sous mon oreille gauche. J'ai presque senti le bruit d'enclenchement quand la sensation a "réintégré" son siège "naturel". C'était dans ma mâchoire, eh oui, évidemment, et nulle part ailleurs.

Sauf que... pendant quelques étranges secondes, cette sensation n'était nulle part, elle était juste la conscience d'une sensation, et elle n'était pas encore localisée. Mais alors, si cette sensation n'était nulle part, où étais-je, moi ?

Ça m'a rappelé un exercice de prise de conscience : au lieu de dire "je respire", pensez "ça respire... à travers moi". Imprégnez-vous de cette respiration dont vous êtes le véhicule et le lieu. Puis demandez-vous : ça respire, d'accord, mais de quel côté de cette respiration suis-je ? Et pendant que je ne respire pas, où suis-je ?

Cette façon de "renverser" le cadre mental de la sensation est extrêmement fructueuse. Elle fait éclater des certitudes qui nous paraissent évidentes : je suis mes pensées ; mes sensations, c'est moi ; mon identité c'est mes souvenirs, etc. Pas du tout ! Notre conscience est traversée de pensées, de sensations, d'émotions, mais en est-elle le produit ? Non, elle n'est que l'écran, où se projette tout ce cinéma intérieur. Et ce "cinéma intérieur"... n'est que du cinéma.

Il est même possible que pendant de fugaces instants, on se rende compte que même la localisation de certaines sensations dans notre corps soit sujette à caution. Alors, "nos" émotions, et a fortiori, "nos" pensées... :-) Nous ne sommes que des spectateurs qui croient à ce qu'ils voient sur l'écran.

Et si on arrêtait d'y croire et de s'en faire pour rien ?

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